La fresque de Kabrit au Viguier

150m² de poésie et d’hymne à la Paix

Deux mains enlacées tendues vers une branche d’olivier dont l’extrémité a pris la forme d’une plume de stylo, une Cité toute en courbe comme suspendue dans le ciel, une fleur de Lys… l’œuvre géante de Kabrit accueille désormais, de façon poétique, les passants qui circulent avenue Jules-Verne, quartier du Viguier.

 

Création d’un parcours de Street-Art

La fresque de 150 m², inaugurée lundi 15 avril, vient compléter 5 autres réalisations de graffeurs réalisées dans le cadre de l’opération "Graff It XXL" portée par l’association One-One, et soutenue par le Contrat de Ville que pilote Carcassonne Agglo*.

Le territoire de Carcassonne Agglo propose désormais un véritable parcours graffiti à la découverte d’œuvres d’artistes comme Reso, Scaf, Abys ou Mero dont on peut admirer les fresques à La Conte, Grazailles, Fleming, Ozanam et maintenant le Viguier.

 

Les habitants associés

Cette fresque a été réalisée en étroite concertation avec la population mobilisée par les médiateurs du centre social Jean-Montsarrat. Les habitants du quartier ont proposé à l’artiste de retrouver dans sa fresque des messages de Paix ou encore une évocation de la Cité. Kabrit a proposé plusieurs esquisses avant d’arrêter son choix sur l’œuvre réalisée au final.

Et pour compléter les traits de son dessin par des paroles, Kabrit a choisi une citation symbole de cet hymne à la Paix et à la connaissance : "Le possesseur de l’art est maître de la Citadelle."

Inscrit en calligraphie arabe et en français, ce dicton du XIXe siècle, ô combien universel délivre un message cher à l’artiste ; celui de l’élévation de l’esprit grâce à la connaissance, de maîtrise de son art, de ses choix et donc de soi-même.

 

 

 Entretien avec Kabrit

 

Donner à voir plutôt ce qui nous lie que ce qui nous sépare…
Kabrit

Comment êtes-vous devenu graffeur ?

Kabrit : Je suis né et j’ai grandi au Liban où j’ai commencé à graffer dès mes 15 ans. Je suis venu en France pour suivre des études de réalisation de cinéma d’animation à l’âge de 22 ans à Lyon avant d’aller vivre à Paris en 2018. Je réalise des courts-métrages notamment sur le thème de l’exil et je propose aussi du mapping 3D, des projections de dessins animées sur des façades d’immeubles, d’églises pour mettre en avant le patrimoine. Cela m’a permis aussi de mêler le graff et l’animation.

 

Comment est né le projet du Viguier ?

J’ai été contacté par Camille de One-One. Je ne connaissais pas Carcassonne, j’ai donc fait un travail de recherche sur son histoire, les Cathares… J’ai proposé mes premières esquisses aux habitants qui souhaitaient quelque chose de poétique, léger avec une représentation de la Cité, de la calligraphie arabe.

 

Quelles ont été les étapes et les contraintes pour la réalisation de l’œuvre ?

La première contrainte était technique avec le manque de recul qui ne permet pas de voir la globalité du dessin. Le premier jour, nous avons projeté, de nuit, les contours de la fresque sur la façade en masquant la lumière d’un lampadaire qui était trop forte. J’ai d’abord travaillé à remplir les espaces en jouant sur les dégradés, du plus clair au plus sombre, avec un pistolet à peinture. Cela donne de la dynamique au dessin. Puis je suis rentré dans les détails. J’ai dû aussi gérer la contrainte de travailler sur une nacelle de camion à 15 mètres de haut. Ce n’était pas toujours très stable.

 

Qu’avez-vous voulu mettre en lumière dans votre fresque ?

J’évoque beaucoup la connaissance dans mon dessin au travers de symboles comme les livres, la plume… Cela revient souvent dans mes créations. Cela m’inspire naturellement car le processus du dessinateur est une recherche constante de nouvelle connaissance. Et c’est une thématique universelle. Mon trait me conduit vers la mélancolie, la légèreté, la contemplation…

 

Que retenez-vous de cette expérience à Carcassonne ?

J’aime les échanges et je travaille à créer des ponts entre les disciplines mais aussi entre la France qui m’a accueillie et le Liban. Ici, j’ai eu beaucoup d’échanges avec la population, notamment des enfants qui venaient tous les jours pour voir l’évolution de la fresque. J’ai pu aussi rencontrer la maman d’un des jeunes décédé l’an dernier. J’ai notamment repris les colombes que l’on retrouve sur un mur du centre social pour rendre aussi hommage aux deux jeunes décédés l’an dernier. J’aime créer de façon à montrer ce qui nous lie plutôt que ce qui nous sépare. Cette diversité est une vraie richesse, une fierté. C’est précieux et il faut que l’on s’en rende compte.

 

 

*projet en partenariat avec Alogea, financé dans le cadre du contrat de ville par Carcassonne Agglo, la ville de Carcassonne, le Département, la Région, la Caf, l’ANCT, la Régie des quartiers, le centre social Jean-Montssarat et une série de sponsors privés.