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Carcassonne Agglo : Comment est venue l’idée de ce spectacle qui parle des langues régionales et des accents ?
Benjamin Tholozan : « Parler Pointu est un mélange de vécu et de fiction. J’ai grandi 20 ans à Nîmes et je vis aujourd’hui à Paris depuis 20 ans. Comme beaucoup d’acteurs ou de journalistes, j’ai perdu mon accent sans vraiment m’en rendre compte. On me disait de faire attention dès les premiers cours de théâtre amateurs et cela me paraissait anodin. Quand je revenais voir ma famille, on me disait que je parlais pointu. C’était un sujet de blague. A l’enterrement de mon grand-père, qui parlait le provençal, j’ai fait un discours sur ce thème et personne n’a rien compris (rire). Je me suis rendu compte qu’en deux générations, cela avait disparu. J’en ai parlé à Hélène François, comédienne et metteur en scène. Nous avons réalisé quasiment une enquête sur le sujet, sur la littérature, la grande histoire. Nous avons fait de l’écriture plateau. Je faisais des impros qu’on filmait et on tapait le texte qu’on recoupait. Mes souvenirs en famille ont nourri mes impros. »
Comment définiriez-vous votre spectacle entre stand-up et pièce de théâtre ?
« Cela débute comme un stand-up puis on part vers une forme de théâtre traditionnel. J’aime beaucoup le style Philippe Caubère, les Monty Python… C’est un spectacle humoristique avec une toile de fond. Cela parle aux gens qui sont partis de leur région qu’il s’agisse de la Bretagne, la Provence ou l’Occitanie et qui ont une forme de nostalgie. Ce que je ressens aujourd’hui. Je crois qu’on ne peut pas se couper de ses racines. Il s’agit de parler d’identité nationale sans être identitaire. Le spectacle donne aussi de la place à la musique avec Brice Ormain, qui a réadapté des chansons traditionnelles, et créé une musique pour le spectacle. »
C’est nouveau pour vous ?
« Je n’avais jamais vécu un spectacle seul en incarnant plusieurs personnages. C’est jubilatoire, jouissif, festif. Pendant l’écriture, j’avais du mal à avoir du recul. Hélène qui est originaire de Madagascar a apporté un parallèle avec la colonisation et a pu apporter ce recul sur le spectacle. »
J’ai mieux compris mes grands-parents avec ce spectacle.
Vous avez déjà joué le spectacle près de 70 fois dont deux au festival d’Avignon, comment a-t-il été reçu ?
« Ma famille l’a bien pris avec ce côté parodique. Mes parents sont nourris à Charlie Hebdo (rire). De mon côté, c’était la première fois que je racontais des trucs vrais et j’avais peur que des personnes soient blessées. Quand j’ai discuté avec des spectateurs après les représentations, ils m’ont tous parlé de leur rapport à la langue, à l’accent. C’est devenu une vraie fiction qui leur permet de discuter. Le spectacle a même été édité. »
Que retenez-vous personnellement de cette aventure ?
« Parler pointu va tourner pendant deux ans avec des dates un peu partout et un retour au festival d’Avignon en juillet. Je regarde aujourd’hui ce projet avec tendresse. J’ai mieux compris mes grands-parents avec ce spectacle. La honte qu’ils avaient pu avoir. Ma mère me disait que ses parents ne lui parlaient pas patois. Ils ne cherchaient pas à transmettre à l’époque. Les choses changent un peu avec la nouvelle génération. Des chanteurs de rap marseillais comme Jul et SCH ont du succès et mettent en avant leur accent. A Toulouse, j’ai vu qu’une série avait été trouvé en occitan et que des jeunes s’exprimaient sur les réseaux. »